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Quid Novi Rock'n'roll ?

Jake Kasdan –Walk Hard, the Dewey Cox Story, 2007

Décidément, je parle beaucoup de cinéma cette saison... Le film d'aujourd'hui est vraiment cool. Walk Hard est une parodie de biopic où nous suivrons la vie, l'oeuvre et la carrière de Dewey Cox, génie tourmenté de sa naissance à sa mort. Vous l'aurez compris dès la lecture du nom « Cox » – qui se prononce en anglais comme le pluriel de bite et qui sera bien sûr un ressort exploité jusqu'à la corde – on va flirter avec le débile d'un bout à l'autre du film.

 

Le destin se précipitera sur le pauvre Dewey Cox encore enfant dans les années 40, dans la ferme familiale où il causera accidentellement la mort de son frère ainé, anéantissant toute possibilité de relation saine avec son paternel taciturne et dur comme la pierre. Mais son talent naturel pour la musique lui apparaîtra comme une possibilité de salut, un sens à sa vie et l'occasion de rendre son père à nouveau fier de lui. Pas vache dans un premier temps, le destin lui offre une carrière incroyable et son tube, « Walk Hard », le propulse en un instant aux côtés des plus grands où les drogues et les femmes faciles vont à nouveau se disputer son âme.

 

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On ne peut pas vraiment dire que l'histoire de Walk Hard soit son point fort. Le fait qu'elle soit un énorme cliché n'est pas un problème ; on en a besoin pour pouvoir faire les liens avec des personnalités bien réelles et souligner le côté parodique du film. C'est plus son traitement qui est laborieux : quelques personnages clés sont à peine esquissés, d'autres, comme le manager de Dewey semblent tout simplement apparaître en plein milieu du film, sans présentation préalable, les histoires d'amour s'enchainent sans qu'on ne comprenne vraiment jamais ce qu'elles représentent pour Dewey occasionnant du coup quelques scènes longuettes où, faute de toute implication émotionnelle, on s'emmerde un peu. C'est triste parce que cette histoire était assez simple à raconter... Ce n'est pas un gros reproche que je formule ici, mais ça plombe forcément un peu le reste et c'est très dommage parce que le film a aussi de très beaux atouts. Le premier d'entre-eux c'est John C. Riley(1), un second couteau du cinéma américain dont vous connaissez forcément le visage et qui est parfait dans son rôle où il est fortement encouragé à cabotiner. Autre atout, bien qu'il soit à double tranchant : l'humour. Je précise « à double tranchant » parce que c'est débile. C'est totalement débile. Tout le monde ne rentrera pas dans le film, c'est certain. Les gags, sont souvent lourds, répétitifs, appuyés et... débiles. Si vous êtes amateur en revanche, vous allez vous régaler et profiter d'autant mieux de ce qui fait l'intérêt du film : la musique qu'il pastiche et le monde de la musique qu'il dépeint. Parodie affichée de Walk The Line(2) (2005) sorti deux ans plus tôt, le film ne se contente pas de pasticher du Johnny Cash est c'est une très bonne chose car cela permet de multiplier les références et de tisser, certes un brin rapidement et artificiellement, une histoire de la musique du XXème siècle. On voit ainsi le jeune Dewey taper le blues avec deux vieux blacks à l'épicerie du coin, chanter, à la fête de son école, une adorable chanson façon Roy Orbison qui déchainera les puritains et détachera les culottes, remplacer le chanteur noir de la boîte où il officie en tant qu'homme de peine au pied levé, écrire son premier succès country rock, connaître la gloire, croiser Franckie Muniz(3) en Buddy Holly et surtout Jack White (hilarant) en Elvis, se marier, divorcer, se remarier, partir se péter la tête au LSD en Inde en compagnie des Beattles(4), devenir fou, tenter de composer son chef-d'oeuvre en réunissant des centaines de musiciens de tous les coins du globes autour d'une chèvre, redevenir fou, toucher le fond, animer une émission de télé has-been, se ranger des bécanes, revenir, etc... Toujours est-il que les compositions troussées pour le film sont bien fichues et que le son des différentes époques est assez bien rendu, sans pour autant donner dans l'archéologie sonore ou dans une maniaquerie déplacée. La réalisation est en revanche assez basique et les idées de mise en scène assez pauvres, le film se fiant d'avantage à ses gags et ses acteurs pour tenir le spectateur éveillé.

 

Je vous laisse vous dégotter ce film avec ce dernier conseil : tenez-vous éloignés de la V.F(5) ! Je le répète, il faut être client de ce genre d'humour, mais on ne peut nier que ce portrait d'une icône fictive, tout pastiche qu'il soit, fait mouche et se fait l'écho déformé d'une carrière musicale « idéale » universelle, compulsant les clichés avec bonheur.

 


NOTES :

1 : Son premier rôle au cinéma était dans Outrages (1989) de Brian De Palma. Ça donne le ton. Mais il a aussi tourné pour Scorsese à deux reprises, plusieurs pour l'immense Paul Thomas Anderson et dans le tout dernier film de Monsieur Robert Altman, The Last Show (2006), un film dont je vous reparlerai très probablement. Bref, il a une carrière longue comme le bras et belle comme un camion.

2 : Walk The Line est le biopic de Johnny Cash sorti en 2005 et réalisé par James Mangold. Le découpage de Walk Hard est assez similaire et les nombreuses analogies entre le véritable artiste et l'artiste de fiction sont nombreuses : l'enfance dans une ferme de l'Arkansas, les débuts logiquement country, le succès, la drogue, etc...

3 : L'interprète de Malcolm. C'est plus clair comme ça.

4 : Avec Jack Black en Maca ! À noter que les deux s'étaient déjà croisés en 2006 dans un autre film rock : Tenacious D in The Pick of Destiny de Liam Lynch.

5 : La V.F n'est pas honteuse, elle fait même quelques efforts louables par moments, mais traduire totalement le film et sa montagne de jeux de mots – au ras du bitume, certes, mais jeux de mots quand même ! – est tout simplement impossible.



27/11/2014
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